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 Tique tique, un conte bizarre de Bob Boutique

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mombro
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mombro


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MessageSujet: Tique tique, un conte bizarre de Bob Boutique   Tique tique, un conte bizarre de Bob Boutique Icon_minitimeVen 9 Juil - 12:57



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Auteur : Sujet: Tique tique, un conte bizarre de Bob Boutique Bas
Bob
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Bob
Posté le 25/06/2008 18:00:15 87.64.29.118 - Modération
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Tique tique

l était une fois un gars super sympa, vingt-cinq ans, un mètre quatre-vingt, tignasse de paille, tâches de rousseur et sourire Pepsodent, un beau gars quoi… qui travaillait dans une grosse boîte d’informatique, située près de l’OTAN, à deux pas de Bruxelles.

Ce n’était pas un ingénieur. Non. Le brave Roger plaisait à tout le monde, mais tout le monde savait aussi qu’il n’était pas une lumière. Aussi l’avait-on casé dans le service comptable, où il s’occupait de l’enregistrement des factures fournisseurs, celles qu’on a toujours bien le temps d’honorer.

Face à lui, dans le local de vingt mètres carrés qui surplombe le boulevard de l’aéroport, Zoé. Un prénom ridicule pour une bonne femme à la limite du ridicule. Quatre-vingt kilos pour un mètre cinquante-sept, noireaude, style portugaise, avec un soupçon de moustache, des poils sur le menton et une énorme paire de lunettes à montures d’écailles, dans lesquelles flottent deux yeux de hibou.

Elle, c’est une lumière. Finaude, avisée, toujours au courant de tout, mais muette comme une tombe. Le genre ‘boulot, boulot’ à qui on a confié les factures clients, celles qu’il faut suivre de très près et doivent être payées au grand comptant.

Voila pour les présentations. Un peu de silence dans la salle, le spectacle va commencer. Les lumières s’éteignent, un spot tout rond éclabousse la tenture rouge de la scène… pan pan pan pan pan… on finit de se moucher ou de se racler la gorge… pan (une fois), pan (deux fois), pan (trois fois)… le rideau s’ouvre.

***

Il est treize heures. Roger revient de la cantine, où il a mangé un poulet frites pour cinq euros et son portable sonne à l’instant où il s’installe devant le pc.

Ne cherchez pas, c’est sa ‘Carmen’, sa petite espagnole. Elle lui téléphone tous les jours, à la même heure, du salon de coiffure, quelque part du côté de Soignies, pour lui poser les mêmes questions, auxquelles il répond en roucoulant, comme un pigeon sur le bord d’une gouttière.

« … du poulet frites… non, juré, je n’ai pris qu’une seule klouche(*) de mayonnaise… avec Bruno, on a parlé de pêche… oui, il a trouvé un coin super cool le long du canal de Charleroi… »
Etcetéri, etcetéra.
(*) cuillerée

Zoé tiquetique sur son clavier, son nez porcin pointé vers l’écran. Elle connaît tout ça par cœur et pourrait même précéder la conversation. Mais cela ne la gêne pas le moins du monde. Que du contraire.

Car Roger, pour elle, c’est… la référence, son feuilleton télé, sa vedette, son icône. Même si elle doit bien admettre qu’il est con comme un balai. Peu importe, c’est plus fort qu’elle. S’il lève la tête pour lui demander gentiment le rouleau de papier collant ou une paire de ciseaux, elle sent comme une onde de chaleur glisser le long de son échine.

Et lorsque parfois, il interrompt son travail et contemple en rêvant les nuages blancs qui se poursuivent dans le ciel, elle l’observe en coulisse et se repaît de sa joyeuse beauté, comme on regarde un enfant.


***

La porte du local est toujours ouverte. C’est comme ça dans la société. Tout le monde va et vient sans protocole, on s’appelle par son prénom et on se tutoie, à l’américaine.

Rosy, la directrice du personnel (aujourd’hui on appelle ça, les relations humaines) entre en coup de vent, une pile de dossiers sous le bras.

C’est une grande bringue, dans la quarantaine, qui se maquille comme une speakerine, n’a jamais l’ombre d’une repousse et porte invariablement un tailleur habillé sur des bas nylon et des hauts talons qui cliquetiquent dans son sillage. Un joli visage aux rides contrôlées et l’esquisse d’un double menton qu’elle efface en tenant la tête bien droite.

Zoé ne l’aime pas. Alors là, pas du tout. Car ‘la vieille’, comme elle la surnomme mentalement, papillote des yeux quand elle croise Roger et change même sa voix qui devient rauque, presque sensuelle.

« Bonjour mon petit Roger… » Pas un mot pour la noiraude qui pianote derrière son pc et qu’elle n’a même pas remarquée. «C’est pour ta demande de congé. Tu n’y avais plus vraiment droit, tu sais… » Elle lui fait de gros yeux. « Mais je me suis arrangée avec le boss. C’est d’accord ! Tiens, signe ici… »

Elle se penche sur son épaule et s’attarde quelques secondes, sa joue si proche de l’autre, qu’on pourrait les croire en train de danser le slow.

« Dis-moi Rosy… c’est quoi ce parfum ?» intervient le beau Roger en plongeant son nez dans le cou de la Péronnelle qui glousse de plaisir, « … ça sent super bon ! »

« Eau des Merveilles de Hermès » répond-elle un peu intimidée.

« Superbe… faudra que je l’achète à ma femme ! »

L’autre pique un fard, ramasse ses papiers et ressort aussi sec, tandis que le grand con sourit aux anges.


***


Un ou deux jours plus tard. Treize heure. Le portable joue l’Habanera du Carmen de Bizet, ‘l’amour est enfant de bohême’ et Roger met immédiatement l’appareil à son oreille avec un Ah de satisfaction qui fait peine à voir.

« Oui ?... Des haricots princesses… non, non c’était très bon… et toi ?... super, t’es vraiment la reine des petites femmes chérie… si, si, je le pense… Ah oui ! J’ai obtenu mon congé… oui, oui, comme une lettre à la poste… » Et patati et patata. La vie est faite de petits riens et pourrait continuer ainsi indéfiniment si…

Si à cet instant précis de notre histoire (mais peut-on appeler histoire, un scénario aussi terne et monotone ?), un petit quelque chose, un détail infime, un chouia de rien du tout, une parole ou même une intonation de trop… n’avait fait déborder un vase.

Car si on écoute bien et pour la première fois depuis toujours, le tiquetique de Zoé s’est interrompu.


***

Elle marche rapidement, les sourcils froncés, la lippe boudeuse, le sac à main collé contre son ventre, rapport aux pickpockets. Ses quatre-vingt kilos se forcent un passage au milieu de la piétaille qui descend en grappe vers le métro.

Si vous pouviez suivre son rythme, vous l’entendriez ruminer comme une vache. Ses prunelles sont noires, presque fixes et ses narines palpitent de colère retenue.

« Ca commence à bien faire… » répète t-elle comme un mantra, « …ça commence à bien faire ! » Pauvre Zoé.

***

Carmen porte bien son nom. Petite et vive comme une andalouse, toujours en mouvement et le verbe haut, elle dirige son grand dadais comme un cheval. Faut voir avec quel regard elle l’exhibe devant ses amies qui toutes, sans exception, se ruent sur leur couple (en fait sur lui) pour demander comment ils se portent ou les inviter à un prochain barbecue.

Mais attention ! On peut regarder, mais pas toucher et la petite Carmen monte la garde comme une rotweiler femelle.

Ce soir, Roger s’est rendu au comité du foot local (rien que des mecs) et elle regarde Koh-Lanta à la télé en grignotant un paquet de chips. Car la petite peut manger tout ce qu’elle veut, elle ne grossit jamais. Encore un avantage dont elle n’est pas peu fière et que les cliente du salon lui envient.

« Mais enfin, Carmen ! Comment faites-vous pour rester toujours aussi mince ? »

Elle rigole in petto en se versant un deuxième verre de vin, lorsque retentit la sonnerie du téléphone, celui de l’entrée.

Qui peut bien appeler à cette heure ? Elle se lève en soupirant, traverse le salon un œil rivé sur l’écran, pour ne rien perdre du conseil en cours, et décroche enfin, la bouche encore pleine de pétales frites : « Allo ? »

Quelques secondes de silence, comme si la ligne était vide, puis une voix de femme, hésitante, qui demande : « Roger… c’est toi ? »

Son sang ne fait qu’un tour et elle enchaîne aussi vite : « Non, Madame ou Mademoiselle, Roger n’est pas là… qui êtes vous ? »

Nouveau silence… suivi d’un déclic. On a raccroché.


***

On ne vous l’a pas encore dit, mais Zoé est ‘près de ses sous’. On pourrait même préciser ‘radine’. Sauf pour la bouffe… on en reparlera plus en détails, mais elle est plus qu’un fin gourmet, quelqu’un qui peut faire la différence entre un foie gras de canard cuit dans un bouillon de volaille et une coquille Saint-Jacques étuvée de fenouil et poivrons doux safranés.

Pour de telles assiettes, le prix ne compte plus, mais pour le reste… on peut carrément dire que ses billets sortent du portefeuille avec un élastique. Aussi est-ce avec stupéfaction qu’on la voit pénétrer ce samedi matin dans la boutique luxueuse de Paris-XL (*), son sac bien coincé contre le ventre.

Une jeune vendeuse à la jupe si courte qu’on voit sa culotte lorsqu’elle lève les yeux d’étonnement, se précipite vers elle avec un sourire commercial qui ressemble à une tirette éclair.

« Madame ? Puis-je vous aider ? Nous avons une très belle variété d’eaux de Cologne, mais également des parfums plus florés à base de jasmin, de muguet ou même de rose, qui conviennent très bien à des personnes de votre âge… Voulez-vous essayez ? »

(*) Parfumerie célèbre de Bruxelles

La grosse la regarde d’un œil torve, attend que le 45 tours ait terminé son speech, puis demande d’un ton de bouledogue. « Eau des Merveilles. »

« Eau des Merveilles ? » répète la Poupée Barbie, les sourcils en guidon de vélo et la culotte rose une nouvelle fois à l’air. « Vous êtes bien sure ? »

« Combien ça coûte ? »

« Hé bien… voyons-voir. » Elle attrape un catalogue et cherche rapidement dans la liste Hermes. « Voila… soixante deux euros ! »
« Soixante deux euros ? »

« Soixante deux euros. » confirme t-elle.

« Mais je n’ai pas besoin d’une bouteille… un petit flacon suffira, le plus petit que vous ayez ! »

« Soixante deux euros… » reprend le disque rayé, « …c’est le prix d’un petit flacon de cinquante millilitre ! » Elle montre la taille avec deux doigts.

Zoé la contemple une seconde, comme si elle venait de péter, farfouille dans sa sacoche et sort le regard noir deux coupures de cinquante que la donzelle lui arrache des mains d’un air hautain. Ces deux là, ne seront jamais copines.

***

Zoé, on l’a compris, ne va jamais à la cantine. Beaucoup trop dégueulasse… Il est midi trente et elle tiquetique son heure supplémentaire sans lever la tête, son nez porcin pointé sur l’écran. Pas une âme en vue, les couloirs sont vides.

Soudain, elle se lève, ouvre son tiroir, y prend le minuscule flacon de parfum, traverse le bureau, décapsule et verse rapidement une gouttelette sous le col de la veste de son collègue.

Le temps de l’écrire, elle a déjà regagné sa place et le tiquetique du clavier reprend. On dirait le tic-tac d’une horloge murale.

***

Roseline Vanneste, dite Rosy, s’observe avec minutie dans le miroir des toilettes pour dames. Quarante ans, c’est un bel âge pour une femme essaie t-elle de se convaincre. Il y a bien sur les pattes d’oie au coin des yeux et ce pli discret qui tombe aux commissures des lèvres. Mais il suffit de sourire (ce qu’elle fait à l’instant) pour découvrir une dentition parfaite et presque blanche.

Elle s’inspecte ainsi tous les matins, avant d’aller manger. Histoire de s’asseoir bien nette et pomponnée devant les cadres de l’entreprise, qui se disputent l’honneur de dîner en sa compagnie.

Rosy ne supporte pas le moindre laisser-aller. Tout doit être parfait. Non pas pour séduire ces quadragénaires un peu ventripotents et dégarnis, qui lui racontent des blagues corsées ou font semblant d’être cultivés. Mais parce qu’elle a pris goût aux compliments et que, ma foi, ils n’en sont pas avares.

Parfois, le petit Roger, prend place à son côté, et elle doit bien reconnaître qu’il ne lui est pas indifférent. Quel beau gosse ! A quelques années près, elle aurait pu être sa mère… mais bon. Il n’a pas l’air de se plaindre de sa présence et elle voit bien (une femme sent ces choses) qu’il joue au petit coq et essaie de briller devant elle.

Elle examine sa coiffure, vérifie qu’aucun cheveu gris n’a échappé à la teinture, rebrosse consciencieusement cette frange qui lui donne un air jeune et déluré. Puis s’apprête à ressortir, lorsque la porte s’ouvre dans son dos.

C’est la grosse de la facturation. Celle-là, elle ne la supporte pas. Rien à redire pour son boulot, mais ce regard de fouine et cette façon de raser les murs… Heureusement, la zombie s’enferme aussitôt dans une toilette, ce qui leur épargne la peine de devoir échanger des politesses. Rosy rassemble son nécessaire à maquillage et s’esquive.

***

La porte du cabinet s’ouvre aussi vite. Zoé, qui n’a même pas relevé sa jupe, s’approche du lavabo que la responsable des relations humaines vient de quitter et inspecte longuement la cuvette de ses grosses loupes à écaille, pour trouver enfin ce qu’elle cherche.

Deux longs cheveux noirs, qu’elle enroule doucement en forme de boulette autour de son doigt et glisse dans la fente d’un vêtement qui ressemble plus à un tablier qu’à une robe.
Deux longs cheveux noirs, qui iront se loger entre l’heure de midi sous le col de la veste de Roger et dans sa poche de poitrine.

***

Laissons passer quelques jours…

Curieux. Il est treize heures quinze et le Gsm de Roger n’a toujours pas chanté ‘l’amour est enfant de bohème’. Le pauvre n’a d’ailleurs pas l’air en forme et travaille avec application, ce qui ne lui ressemble vraiment pas.

« Votre épouse est en vacances ? » interroge Zoé qui l’observe par dessus l’écran de son ordinateur.

Il relève la tête et regarde les deux hublots aux montures d’écaille, interloqué. C’est bien la première fois qu’elle lui adresse la parole pour autre chose qu’un bic ou un dossier.

« Non, pourquoi ? »

« Pour rien… » conclut la grosse en re-disparaissant derrière son pc.

« Oh ! Je suppose que vous vous demandez pourquoi ma femme ne téléphone pas ? » ajoute t-il en interrompant son boulot. « Je n’en sais rien. Depuis quelques jours, elle me tire la gueule et je ne sais même pas pourquoi ? Vous vous rendez compte… vous qui êtes une femme, vous comprenez ça ? »

« Elle ne vous a rien dit ? » résonne la voix de Zoé derrière son ordi.

« Non, pas un seul mot… »

Un silence. Interruption du tiquetique. Et enfin…
« Votre épouse est une femme intelligente. »

Roger regarde la bouche en cul de poule, sans comprendre, hausse les épaules, pousse un long soupir et se remet au travail.

***

Deux semaines plus tard.

L’été se termine en quenouille (orages et pluies) et se retire sur la pointe des pieds. Les vacances sont bien terminées et dans la boîte, tout le monde se remet à courir dans tous les sens à la recherche du chiffre d’affaires. Vous n’avez pas vu le chiffre d’affaires ? Non… vous avez regardé sous la photocopieuse ?

Zoe s’approche silencieusement de la réceptionniste de l’entrée, qu’elle surprend dans la contemplation amorphe de l’écran de surveillance, où quatre images semblent figées en croix.

« Mon dieu… » sursaute la fille la main sur le cœur, « …vous m’avez fait peur, j’ai cru que c’était Monsieur Jaquet ! »

« Vous n’auriez pas le portable de Madame Vanneste ? » demande le hibou avec un regard neutre et poli. « Je dois la contacter et elle est sortie… »

« Un instant… » La standardiste farfouille dans son désordre, trouve l’annuaire et recopie le numéro sur un bout de papier.

« Merci… » répond la grosse qui s’en va comme elle est venue, lourdement et sans bruit.

***

Ce midi, Roger a trouvé une place en face de Rosy et lui explique en long et en large la mauvaise passe que traverse son couple. Quand on est con, on l’est en général pour toute la vie.

Celle qui pourrait être sa mère, à quelques années près, mais a encore de très beaux restes, l’écoute avec ravissement. Car ils parlent à mi-voix, presque en intimité et que leurs genoux se touchent sous la table.

Pendant ce temps, dans le bureau désert, deux étages plus bas, Zoé recopie dans l’agenda du bel imbécile, le numéro de téléphone qu’elle a reçu à l’accueil. En choisissant un endroit discret, tout à la fin, en lettres minuscules et sans nom en regard. Juste ce qu’il faut pour intriguer. Puis elle remet le carnet dans la poche intérieure de la veste où elle l’a emprunté.
Dehors, le temps se gâte. Le ciel est sombre, menaçant et les nuages se poursuivent en s’entredéchirant.

***

Ajoutons encore quelques belles journées de septembre.

« Roger… voulez-vous m’aider s’il vous plait ? » Le hibou est debout à côté de sa table de travail, avec la tour de l’ordinateur dans les bras. « Le câble du réseau s’est entortillé avec celui de l’imprimante et il faudrait démêler les fils. »

Le grand se lève aussitôt, toujours heureux de rendre service, et plonge à croupetons sous le bureau où on l’entend ahaner et pousser un juron discret en se cognant le crâne contre le cadre en alu.

« Les femmes de ménage ne doivent pas passer souvent ici en dessous des bureaux… » commente t-il en tripatouillant les fiches, « …c’est plein de peluches(*) et plus poussiéreux qu’un grenier. »

(*) flocon de poussière

Zoé attend patiemment qu’il en ait terminé et au moment où il s’extirpe enfin à reculons des profondeurs informatiques, laisse tomber l’appareil d’un seul bloc sur ses épaules.

« Aie ! » hurle t-il en retombant sur les genoux.

« Oh, je suis désolée… » s’écrie t-elle en reprenant avec maladresse la lourde caisse métallique, « vous n’êtes pas blessé ? »

« Non, non, ça va.. » répond le brave, en se redressant avec une grimace de douleur. « J’espère que ma chemise n’est pas déchirée… »

« Non, mais je crois que vous allez avoir une belle griffe dans le dos… »

Et chacun de retourner à son siège, l’un en se massant l’omoplate et l’autre avec sur sa bouille lunaire, un curieux sourire, plus mince qu’une lame de rasoir.

***

« Carmen… » Roger se dresse devant elle, les bras ballants, les yeux implorants. « Dis-moi ce qu’il y a…je t’en prie. Tu ne me parles plus, tu ne rigoles plus, tu ne m’engueules plus… Mais qu’est ce qui t’arrive ? J’ai fait quelque chose ? »

Pas de réponse. Elle repasse des chemises le front baissé, une mèche rebelle dansant devant son œil noir et fixe.

« Mais réponds-moi… dis quelque chose » insiste t-il en s’asseyant à même le sol, contre le mur. « Qu’est ce que j’ai fait, que me reproches tu ? »

Elle repose le fer d’un coup sec. « Je ne sais pas, c’est ça le problème… je m’interroge ? »

Puis comme il écarte les bras en signe d’incompréhension.

« C’est lundi, la fête à ton boulot ? »

« Ben oui, comme chaque année, fin septembre… »

« J’irai avec toi. »

« Mais ma Puce… ça ne va pas… ça ne se fait pas… tu sais quand même que les époux et épouses ne sont pas invités ! C’est juste entre collègues… ça a toujours été comme ça ! »

« Comme ça ou pas comme ça, je viens avec toi… Je ne connais personne à ton travail. C’est le moment de faire connaissance… t’as qu’a inventer quelque chose ! »

Il la contemple bouche bée.

« Explique leur que les coiffeuses ferment le lundi et que j’en profite pour faire mes achats professionnels à Bruxelles, ciseaux, shampoings… débrouille-toi. »

« Bon, d’accord… » accepte t-il enfin en se grattant la tête. « C’est pas habituel, mais… je suppose que ça passera ! »

***
La grande fête du personnel se déroule invariablement de la même façon. On termine le travail à une heure, on ferme la grande porte vitrée qui donne sur la rue, on vide le show-room pour y ranger des tables et des chaises, puis on apporte les bouteilles, les sandwichs et la sono commandés par Rosy, aux frais du patron. La musique aidant, tout le monde descend par petits groupes.

Au début, c’est plutôt guindé. On parle boulot et on échange des plaisanteries très comme il faut. Puis imperceptiblement, l’ambiance monte… les verres se vident, se remplissent, se revident, les cravates se dénouent et enfin, on se met à danser. Sur place d’abord, en tenant son Martini d’une main et une cigarette dans l’autre, puis sur la piste, où les rires un peu éméchés se mettent à fuser. Bref, rien de bien particulier.

Le dikke Gert (‘le gros Gerard’) du stock est comme d’habitude le premier bourré et fait le tour de la salle avec une bouteille de mousseux qu’il propose à tout le monde, sans oublier de donner l’exemple, une partie dans sa flute et l’autre sur le dallage. Mieke du commercial, a déjà perdu un bouton dans l’aventure et son décolleté s’évase doucement en direction du nombril.

Le son des baffles (deux fois 200 watts) devient assourdissant et les fenêtres commencent à vibrer au rythme d’un Iglesias. Pas le père. Non. Encore pire, le fils ! Ben oui, c’est comme ça. Ici, on aime le latino.

***

Zoé est assise dans un coin, près des vitrines d’exposition et observe cette scène breughélienne d’un œil torve. Pas de danger qu’on l’invite à danser. Ca n’est jamais arrivé et à dire vrai, la plupart des employés de la boîte ignorent même son prénom. Tout le monde connaît Mademoiselle Dumortier, celle qui sait tout, la protégée de Jaquet, mais pour le reste, basta.

De temps en temps, l’un ou l’autre passe à sa portée et lance prudemment : « alors, ça va ? », mais elle pourrait répondre oui ou non ou même ‘pas très bien, j’ai un cancer au stade terminal’ qu’il s’en irait quand même , le pouce levé, en commentant : « super, super… chouette ambiance, hein ? »

Zoé s’en fout et attend patiemment que cette bande de minables termine son happening pour rentrer à l’appartement et se cuisiner… voyons voir : que pourrait-elle déguster ce soir ? Elle hésite encore… des boulettes à l’indienne avec… mais oui, pourquoi pas, une mousseline de pommes de terre aux brocolis… un peu de crème fraîche, un jaune d’œuf, sel, poivre…
Ou alors… qu’avait-elle encore trouvé ce matin dans le ‘Guide de la cuisine… ah oui, une salade de choux aux lardons…

***

Il y a un tel tintamarre et une telle animation dans la salle que personne n’a remarqué la porte qui s’ouvre et découvre une bonne femme, plutôt mignonne, qui s’encadre dans l’embrasure et semble chercher quelqu’un du regard. Personne, sauf Zoé qui, bien qu’étonnée, devine tout de suite de qui il s’agit. Petite, noirette, l’air décidé, yeux de braise…

‘Qu’est-ce que Miss Andalousie vient faire ici ?’ se demande t-elle, soudain très excitée, au point d’en oublier ses recettes culinaires. D’ailleurs voila le grand dadais, qui se précipite vers elle, un sourire embêté sur son beau visage.

Zoé ne perd pas une miette de la confrontation et doit même se pencher à 45° pour suivre leurs échanges verbaux, joue contre joue, tant la sono est tonitruante.

D’autres interviennent à leur tour, intrigués par la présence de cette étrangère, que leur copain présente avec des explications visiblement emberlificotées.

La grosse s’amuse comme une folle, car elle voit bien que Carmen n’écoute personne, répond d’un sourire distrait et scrute surtout d’un regard noir, les unes après les autres, les poufiasses qui se déhanchent sur la piste en agitant des culs de brésiliennes et des seins de négresses.

« Marthe ! » intervient Zoé en arrêtant du bras la réceptionniste qui passe devant elle avec un plateau de zakouskis. « Tu as vu ? » Elle montre discrètement du menton, le petit groupe qui continue à bavarder devant l’entrée.

« Ben oui… que veux-tu que j’y fasse ? » répond l’hôtesse dont le chemiser commence lui aussi à se découvrir.

« Si Jaquet apprend ça… » poursuit la grosse à mi-voix, « … tu le connais, ça va gueuler… et comme c’est toi qui est à l’accueil ! »

« Mais j’y suis pour rien, moi… elle a du entrer par le parking ? » Elle hésite une seconde désemparée… « Tu crois que je devrais aller lui dire ? C’est pas facile… c’est quand même la femme de Roger ? »

« A ta place… » chuchote notre araignée, les verres de ses lunettes luisants dans la pénombre, « … je préviendrais Rosy. Après tout, c’est elle la responsable du personnel… elle fera ça très bien… ne t’inquiète pas, tout en diplomatie. »

« T’as raison… » conclut l’autre, toute heureuse d’avoir trouvé un bouc émissaire, « …je vais la prévenir. »


***


La suite se déroule comme un ballet bien huilé.

Un, la réceptionniste se faufile entre les danseurs jusqu’à Rosy qui discute tranquillement avec le directeur technique, un grand chauve que tout le monde appelle Chirac parce qu’il parle toujours d’un air pompeux, comme s’il portait un toast dans un dîner de mariage.

Deux, les deux femmes se concertent brièvement. La responsable des relations humaines se dresse sur la pointe des pieds pour examiner le couple qui devise près de l’entrée, tire une moue de désapprobation, puis signale d’un mouvement de tête, qu’elle va s’en occuper.

Trois, Rosy traverse la salle dans l’autre sens, en essayant tant bien que mal d’éviter ses collègues qui se démènent dans un boucan pas possible, et s’avance vers Carmen, avec un sourire 52 dents, et la mine profondément désolée de quelqu’un qui doit annoncer la mort de toute une famille dans un accident de voiture.

Quatre, notre Andalouse la voit s’approcher d’un air méfiant et soudain…

La ré-vé-la-tion.

La petite examine la coiffure apprêtée de sa vis-à-vis, arque le bout de son nez, fait vibrer ses narines et ses yeux passent instantanément du sombre au noir le plus profond. Dans un dessin animé, on décrirait ça avec un éclair bleu qui crépite autour des antagonistes et un grand coup de cymbale.

A dix mètres de là, de l’autre côté de la salle, Zoé exulte et doit se contenir de toutes ses forces pour ne pas bondir… de quoi, au fait ? De joie ? D’émotion ? De rage ? Elle-même l’ignore, mais bon sang. quelle giclée d’adrénaline !

***

Passons sur les détails et l’échange glacial entre les deux femmes.

Carmen s’engouffre dans l’ascenseur ‘raide comme une saillie’ pour reprendre l’expression de Jacques Brel. Le miroir de la cabine pourrait fondre à l’emplacement de ses yeux tant ils fulminent de rage contenue.

‘Non mais !’ Se faire éconduire devant tout le monde, par la maîtresse de son mari. Faut le faire ! ‘Un vrai plouc celui là…et un faux-cul ! On aurait dit qu’il cherchait un trou de souris pour se cacher… Elle l’aurait bien giflée, mais il ne perd rien pour attendre… D’ailleurs elle l’a planté sur place, tant il avait l’air ébahi, nul… c’est exactement ça… nul ! Et cette grande bringue alors… déguisée en hôtesse de foire, avec son nid d’oiseaux sur la tête, son maquillage de pute et ses airs de ne pas avoir l’air !’

Elle shoote contre la double porte du lift, qui s’ouvre comme par magie sur le hall d’accueil plongé dans la pénombre. Les néons sont éteints et seul le comptoir de la réception brille faiblement d’une lumière bleue, due au téléviseur de contrôle sur lequel bougent quatre images en croix.

La furie, qui s’apprête à rejoindre sa voiture, a déjà la main sur la porte du garage, lorsqu’une idée lui traverse l’esprit. Elle s’arrête, hésite une seconde, revient sur ses pas, s’approche lentement du bureau et prend place sur le siège à roulettes de Marthe.

Sur l’écran, trois images sont immobiles, leurs caméras étant fixées sur le trottoir devant l’entrée, le parking et un long couloir truffé de portes. La quatrième par contre ressemble a une émission de variétés, dont on aurait coupé le son, car il donne sur la salle qu’elle vient de quitter, avec les connards qui dansent en silence.

Carmen aperçoit au bas de l’appareil un petit boitier comprenant quatre touches et deux petits curseurs cylindriques qu’elle identifie rapidement. Un plot pour visionner une caméra en plein écran et deux boutons pour la faire pivoter et zoomer.

***

Là… elle distingue Roger, environné de secrétaires (elle a l’habitude), qui explique pour la dixième fois, la mine déconfite, ce qui vient de se passer. Il a vraiment l’air de ne rien comprendre et les gonzesses semblent toutes prêtes à le prendre dans leurs bras pour le consoler (ça aussi, elle connaît).

Mais alors, où est la pute ?

Elle exécute un travelling circulaire et la découvre bientôt en pleine discussion avec trois cadres qui jouent au supérieur et là… nouvel étonnement. La Rosy sourit, s’esclaffe en agitant sa flute de mousseux, se dandine d’un haut talon sur l’autre, bref se conduit comme si tout se déroulait le plus normalement du monde.

Carmen fait plusieurs va-et-vient avec la caméra et doit se rendre à l’évidence : les deux amants ou prétendus amants n’ont pas l’air d’être des amants. Une femme voit ces choses… le regard qui glisse, un dos qui se redresse, un ventre qui rentre. Non. Rien. Ou ces deux là sont les champions toutes catégories de l’hypocrisie ou il n’y a rien ! Et puis, elle connait son mec. Au moindre mensonge ou faux semblant son nez s’allonge comme celui de Pinocchio !

Mais alors ?

Elle s’appuie des coudes sur le comptoir et se met à phosphorer, les mains jointes sur son nez.

Il y en a une autre ?

Elle retourne a son écran et entreprend de zoomer sur toutes les bonnes femmes de la salle, en essayant d’en repérer une qui fixe son homme ou parait s’y intéresser. Effectivement, il y en a une… une petite grosse avec des lunettes de plongée, assise près des vitrines d’exposition. Un vrai thon, dont le regard ne quitte pas une seconde son homme.

‘ Zoé…’ devine t-elle. ‘C’est la seule qui connaît suffisamment Roger pour comprendre ce qui s’est passé… elle doit savoir… je suis sur qu’elle est au courant !’

***

Zoé fonce vers la bouche de métro, son sac coincé contre le ventre rapport aux pickpockets et aux voleurs à la tire. Elle rumine de sombres pensées, tout en pestant contre ces syndicalistes à la con qui organisent cette fête ridicule.
La vérité, c’est qu’elle est désemparée. La rencontre entre Carmen et Rosy s’est déroulée de façon inattendue, plus tôt que prévu, mais exactement comme elle l’avait prévu et ça… ça flatte son intelligence. Mais elle n’éprouve aucun plaisir. Au contraire…

Elle revoit le visage perdu et catastrophé de son ‘grand enfant’ devant la punaise qui lui sert de femme. Il était au bord des larmes et elle même, derrière ses hublots humides, avait toutes les peines du monde à cacher son émotion. Heureusement que personne ne la regardait. De ce côté-là, elle est tranquille. Personne ne la regarde jamais…

***

Son immeuble n’a pas d’ascenseur, mais il est stylé et sa cage d’escalier une pure merveille, qui vaut donc la peine d’être gravie à pieds. Zoé monte lentement, en laissant glisser une main boudinée le long de la rampe en fer forgé et énumère déjà dans sa tête la liste des ingrédients nécessaires à son prochain souper.

‘Oui, normalement j’ai tout…’ se dit-elle en atteignant son palier plongé dans la pénombre. ‘Il me reste quelques échalotes roses et deux ou trois rondelles de citron pour décorer…’
C’est au moment où elle introduit sa clé dans la serrure de la haute porte ouvragée qu’elle entend la voix.

« Bonsoir Zoé ! »

Elle sursaute à peine et distingue une forme sombre, assise sur les marches qui mènent à l’étage supérieur. Elle a déjà compris. C’est Carmen.

« Je suis désolée de vous déranger comma ça… mais je devais absolument vous voir… et je crois que vous en connaissez la raison ? »

Zoé la regarde un instant sans un mot, puis pénètre dans l’appartement en laissant le battant ouvert. Signe que l’autre peut entrer.

« Il fait superbe chez vous… » enchaîne la punaise en se glissant discrètement derrière elle dans un vaste salon au plafond ouvragé, où pend un lustre de cristal. « Superbe ! »

La grosse se débarrasse de son sac qu’elle laisse tomber sur un canapé de style Louis quelque chose, enlève son imper puis traverse la pièce en direction de la cuisine, comme si sa visiteuse n’existait pas.

« Ecoutez-moi Zoé… » poursuit la petite en la suivant à la trace, « si quelqu’un connaît mon Roger, c’est bien vous… rien ne vous échappe, il me l’a répété cent fois… il me faut un nom, un seul… un nom et je repars tellement vite que vous aurez l’impression de ne pas m’avoir vue ? »

Zoé ouvre son frigo et s’attarde songeuse devant les victuailles soigneusement alignées sur les rayons transparents… Lorsque la petite furie saute sur son dos et applique avec force sur son nez porcin un tampon à forte odeur pharmaceutique.

***

Et arriva ce qui devait arriver.

***

Combien de temps est-elle restée dans les vapes ? Une bonne demie heure pense t-elle. Pour autant qu’elle soit encore en mesure de mettre deux idées l’une devant l’autre. Elle veut relever la tête mais une douleur stridente lui traverse le crâne. ‘Attends, ma fille… calme… garde les yeux fermés et attend quelques secondes !’

Du chloroforme ! Cette peste a employé du Chloroforme et ça marche. La preuve. Elle entend vaguement du bruit autour d’elle, (quelqu’un qui va et vient), puis se rend compte, qu’elle est immobilisée, les mains entravées dans le dos contre le dossier d’un fauteuil. Idem pour les jambes, fermement liées contre les pieds en bois.

Elle soulève enfin les paupières et découvre une scène bien étrange. Carmen a déplié la planche à repasser et vérifie la température du fer, une manne de linge posée sur une chaise.

« Ha, on se réveille ! Ca va ? Pas trop mal à la tête ? » Ses prunelles noires plus fines que des têtes d’épingle la traversent de part en part. « Oui… quand je suis très énervée, il n’y a que ça qui me calme : le repassage ! »

‘Elle est folle’ songe la grosse, plus intéressée qu’inquiète. ‘Cette fille est folle, aussi cinglée que moi…’

« J’ai vidé ton séchoir. Oh, il n’y avait pas grand-chose, mais ça m’aide à passer le temps ! » Elle déploie une blouse mauve avec de petits boutons argentés (Vingt-trois euros chez ‘Mirabelle’) et l’étend délicatement sur la housse molletonnée. « Oui… j’ai un peu fouillé pendant ton absence, tu ne m’en veux pas ? »

‘Que sait-elle exactement ?’ se demande Zoé en agitant ses doigts engourdis par le lien, un rouleau de scotch qui se trouvait dans le tiroir de la cuisine.

« 613… ça te dit quelque chose ? » poursuit Carmen en attaquant le col satiné.

Le numéro du bureau traduit la grosse en silence, le visage renfrogné. Sixième étage, local 13.

Et la furie de lui expliquer en détails, presque gaiement, l’histoire des écrans de surveillance et du zoom final sur Zoe le regard fixé sur son homme.

« J’ai d’abord pensé que tu savais que mon connard de Roger me trompait et que tu t’inquiétais pour lui… Ca ne pouvait pas être toi. Il suffit de voir ta tronche… on dirait une truie à lunettes ! » Elle projette un jet de vapeur, puis se met à repasser une manche.

« Alors, je me suis dit comme ça… et si on profitait qu’ils sont tous en bas à déconner, pour faire une petite visite au bureau ! Je savais que c’était le 613, puisque c’est ainsi que mon grand dadais commence sa semaine… » Elle l’imite : « En avant toute… cap sur le 613 ! »

Elle retourne posément la blouse, l’étend délicatement du plat de la main et reprend son travail. « Oh, je n’ai pas du chercher longtemps… tu sais ce que j’ai trouvé dans ton bordel, Miss Peggy ? » Elle va jusqu’à la table du salon et revient avec un objet qu’elle brandit devant les loupes atones de la grosse, qui ne bronche toujours pas, comme absente.

« Ca ! Un flacon d’’Eau des Merveilles’… et puis encore… ceci… une enveloppe de carte de visite avec des cheveux roulés en boule ! Et des tonnes de magazine de cuisine ! »

Elle se penche vers elle. Si près que ses cheveux mi-longs caressent la joue de la prisonnière qui baisse la tête, comme quelqu’un qui boude.

« La cuisine… la bouffe… on dirait que ça te botte, petite truie gourmande. Ton frigo est plein à ras bord. Et pas des trucs de chez Aldi… non, non, du super frais de chez Rob ! Dis-moi ça doit couter un max tout ça ? »

« Je vais te dire… je parie que le soir tu te goinfres en silence… tout comme tu baves devant mon mec en faisant semblant de tiquetiquer sur ton clavier ! »

‘Bien vu’ se dit le hibou, ses grosses lèvres moustachues serrées comme une paire de fesses. ‘Cette peste est maligne comme une guenon… bien fait pour ma pomme. A force de me savoir supérieure aux autres, je suis tombée sur une alter ego !’

La petite se redresse soudain, avec une lueur délirante dans le regard. « Une pince à sucre… il me faut une pince à sucre ! » Elle retourne à la cuisine où on l’entend farfouiller dans les tiroirs et réapparaît bientôt avec l’objet à bout de bras.
« Un instant, petit groin à jumelles… puisque tu n’as rien à dire, pas un mot, pas un commentaire, même pas une excuse, Maman va te faire passer le goût des choses… »

Elle tire la planche à repasser devant la trogne bourrue de Zoe qu’elle attrape par le chignon et coince contre la table de travail, lui écarte la bouche avec son outil, lui attrape la langue qu’elle tire comme une vulgaire languette, lève son fer dont elle essaie d’un coup le spray vapeur et dépose la semelle bouillante sur la muqueuse humide dont elle brûle aussi vite toutes les papilles.


***


Cela va vous paraître bizarre, mais Zoé n’a rien dit. Pas un mot. Elle est revenue un mois plus tard à la boîte en inventant un accident qui n’intéressait personne. Bien sur, on ne comprend plus rien de ce qu’elle bredouille, mais comme de toute façon elle ne disait jamais rien, Jaquet a décrété que cela n’avait aucune importance.

Autre chose. Roger est parti. Carmen lui a trouvé un boulot de plombier chez son oncle et il paraît qu’il est très content.

Le bureau fait vide, quand on passe devant. Il faut vraiment s’arrêter pour apercevoir dans le coin près de la fenêtre, la touffe de cheveux gris de Zoé qui dépasse derrière l’écran de la comptabilité.

Tiquetique tic tic tique tique,



FIN

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mombro
Posté le 25/06/2008 18:26:56
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merci

j'ai pas encore tout lu car je suis à la bourre. je finirais plus tard. sympa le début. Cici devrait aimer aussi.

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Posté le 26/06/2008 11:20:52 83.156.183.35 - Modération
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je lirais quand j'aurais fini mes exams
et je t dirais mon avis

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Posté le 27/06/2008 14:28:55 83.156.181.169 - Modération
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j'aime bien personnellement
tu es écrivain? mets tu tes oeuvres quelques parts pour qu'on les voit?

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Posté le 27/06/2008 22:06:35
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tu suis pas toi, il l'a déja dit.

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Posté le 27/06/2008 23:04:17 83.156.181.169 - Modération
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non
je t ai dis, j'ai pu mes neurones mdr

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MessageSujet: L' écureuil, un conte bizarre de Bob Boutique    Tique tique, un conte bizarre de Bob Boutique Icon_minitimeVen 9 Juil - 12:58



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Auteur : Sujet: L' écureuil, un conte bizarre de Bob Boutique Bas
Bob
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Bob
Posté le 09/04/2008 17:30:46 80.201.79.19 - Modération
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Contes bizarres

L’écureuil

Il était une fois un mec tout ce qu’il y a plus convenable, la petite cinquantaine, marié, deux enfants, les tempes qui commencent à se dégarnir, quelques kilos de trop, une voiture de société ( un mec normal, quoi ! ), qui joggait dans la forêt de Soignes en se tenant la hanche d’une main, car il commençait à souffrir d’ un point de côté.

Il sent le café du petit-déjeuner lui monter dans la gorge et regrette déjà son escapade. Il fait frisquet, humide, et ses lunettes se couvrent de buée à chaque fois qu’il exhale un soupir. Car le con s’est tellement dépêché pour enfiler son training , assis de travers, les fesses à l’air, sur le siège de la 4x4, qu’il a oublié d’enlever ses varilux.

Merde de merde. Tout ça pour rentrer à l’appart en roulant les mécaniques, rouge comme une pivoine, et épater sa moitié qui se lève à l’instant et s’assoit en peignoir, derrière la table de la cuisine pour se verser un kawa bien chaud !

Il pourrait s’arrêter et rentrer mollo à la voiture, mais à quoi bon ? D’une part ça gèlerait sa transpiration sur place ( pneumonie assurée ) et il vient de dépasser l’aire de jeux, avec les rondins en bois, qui marque la moitié du parcours. Non. Il ne lui reste plus qu’à forcer l’allure en se traitant de tous les noms.

Un petit espoir, comme ça en passant… celui de croiser la bonne femme qu’il a rencontrée dimanche dernier. Elle trottait en sens inverse avec un labrador qui au passage s’est jeté sur lui. Pour le lécher ou le mordre, allez savoir ? Dans ces cas-là, on ne joue pas au héros et il shootait dans le vide pour empêcher l’animal d’approcher.

Puis tout le monde s’est calmé. La gonzesse, qui portait une superbe paire d yeux vert, s’est excusée et ils ont fini par bavarder tranquillement de tout et de rien, pendant que le clebs partait à la cueillette aux champignons.

Il la trouvait excitante avec ses ronds de transpirations sous les aisselles et les mèches rousses qui lui collaient au front.
Mais rien en vue, pas de Lauren Bacall, ni même d’Alice Sapritch. Tout Bruxelles a compris qu’il faisait vraiment trop dégueu pour aller faire son zwanze dans le bois. Tout Bruxelles, sauf un… qui se met à tousser, renâcle, remugle et envoie un gros crachat bien mousseux sur le tronc d’un hêtre qui ne lui avait pourtant rien fait.


***

C’est alors qu’il le voit.

Un superbe écureuil roux foncé, presque aussi gros qu’un chat, avec une queue semblable à un plumet de chevalier, deux longues touffes de poil au bout des oreilles, un œil noir qui brille comme un bouton de bottine et un ventre blanc. Il se dresse sur une souche d’arbre, à quelques mètres à peine. On le dirait empaillé.

Devos pile sur place ( ha, on ne vous l’avait pas dit ! le gars s’appelle Devos comme un flamand sur deux ) et observe en retenant son souffle, un petit nuage de vapeur s’élevant autour de lui comme un train à l’arrêt.

« Awel ! » dit-il enfin à l’animal, en étouffant la voix pour ne pas l’effrayer : « Tu va déjeuner ? Tu attends Madame ? »

Soudain, plus rapide que l’éclair, la boule de poil bondit d’un saut sur le fut d’un arbre, dont il fait trois fois le tour pour reprendre illico sa posture immobile. Comme si on l’avait mis sur pause. La gouttelette brillante de son œil toujours fixée sur notre joggeur du dimanche.

« Je vais te dire, Fieu… » poursuit notre homme . « J’en ai jamais vu un comme toi, en vrai ! Ouai, des petits écureuils coréens, avec des lignes noires et une tête de rat, qu’on fait tourner dans des roues en bois, tant qu’on veut… mais un ‘echte’ comme toi, avec la queue en panache et tout ça… jamais ! »

Il amorce un mouvement et l’écureuil disparaît à l’instant, plus vite qu’une bulle de savon qui pète ! Derrière le tronc sans doute. Devos s’avance, contourne le fut sur la pointe des pieds et aperçoit le rongeur… mais deux arbres plus loin, accroché à l’écorce comme un col de renard qu’on aurait abandonné sur une penderie.

« Faut pas t’enfuir, speedy Gonzalez… je veux seulement te regarder ! »

Il esquisse encore une enjambée sur le tapis de feuilles spongieuses et… whip ! Axel Red se barre une nouvelle fois vers un énorme chêne dont les racines tordues pétrissent le sol et tentaculent aux alentours. Cette fois-ci, il s’est volatilisé.

« Mais attends… » insiste notre joggeur en le cherchant des yeux. Il fait le tour du Roi des forêts et découvre à même le sol, un grand trou sablonneux dont la galerie pentue plonge sous les souches.

Ca, c’est beaucoup trop grand pour le Spirou se dit-il. D’ailleurs, il se souvient fort bien que dans les dessins animés de Walt Disney les écureuils nichent dans les arbres… mais où est donc passé le plumeau volant ?

Il se met à genoux sur la mousse humide, les mains à plat devant lui, et se penche si fort pour examiner l’intérieur de l’orifice qu’on pourrait s’imaginer qu’il prie en direction de La Mecque.

***

Et vlan ! Voila que les lunettes tombent de son nez et glissent vicieusement au fond de l’excavation.

« Potfer’doum’ » jure t-il en se remettant à genoux. ‘Deux fois deux cent- cinquante euros pour les verres et quatre cent-vingt pour la monture, ultra-légère, en titane… J’ai pas intérêt à rentrer sans mes loupes, déjà que Gerda les trouve dix fois trop chères ! ‘

Il se repenche vers le trou, mais voit évidemment beaucoup moins bien et ce n’est qu’en plissant les yeux, qu’il aperçoit le vague reflet des verres briller dans le noir, à moins d’un mètre.
Bon. Quand faut y aller, faut y aller.

Le voici à plat-ventre sur le sol glacé et détrempé, dont l’humidité traverse le jogging et mouille le slip. Il tend le bras à l’extrême, l’épaule enfouie dans le sable et la tête coincée contre les racines. Trop court. Il sent la branche métallique au bout des doigts, mais n’arrive pas à l’agripper et pire, la repousse involontairement un peu plus loin.

« Merde ! » hurle t-il en se redressant à nouveau pour souffler. Tout le devant de son survêt est inondé de boue. ‘Je ne vais pas y arriver comme ça… ‘.

Il cherche une solution autour de lui et repère à quelques pas, une longue brindille dont le bout en forme de flèche pourrait servir de crochet. Il s’en empare, l’élague un peu pour la rendre plus maniable puis la plonge dans le trou en essayant, à l’aveuglette, de récupérer ses lunettes.

Tout ça est beaucoup plus facile à raconter qu’à faire, car le tunnel est incurvé et sa brindille rigide, mais droite. Non seulement il n’arrive pas à cramponner la paire, mais celle-ci s’enfonce une nouvelle fois de quelques centimètres…

« Godfer d’ju ! » peste t-il une nouvelle fois. ‘Va falloir recourir aux grands moyens et me faufiler dans ce tunnel de merde. En clair, engueulade assurée de Gerda, car je vais en sortir noir comme un mineur de fond ’. Mais il en a marre, d’autant plus qu’ un petit vent vient de se lever qui le fait frissonner comme une feuille morte.

Et le voila qui enfonce prudemment la tête dans l’orifice, un bras tendu vers le fond terreux et l’autre plaqué contre le corps, la main solidement arrimée à une des souches qui couronne l’entrée.

***

La boue glisse le long de son crâne et s’infiltre dans une oreille. Ses doigts pianotent dans le vide et l’ongle de l’index touche soudain quelque chose qui pourrait être la monture ou un bout de racine… mais, allongé comme il est, la figure coincée contre le thorax, il ne distingue strictement rien, sinon la vague lueur du jour dans son dos.

Il tente d’allonger son index le plus loin possible, mais la paroi est si visqueuse que l’objet s’esquive une nouvelle fois hors de portée. ‘Non, c’est pas la bonne formule… ‘

Devos s’extirpe du trou et s’affale contre le tronc du chêne en recroquevillant ses jambes contre la poitrine, tant il commence à faire glacial. ‘Je l’avais presque..’ gémit-il en frottant énergiquement les paumes l’une contre l’autre pour essayer de se réchauffer.

‘je vais encore faire une tentative et si ça ne marche pas, j’irai chercher des outils !’ Une bêche et une machette pour agrandir l’orifice et une binette avec un long manche pour fouiller dans l’excavation . Mais d’abord un dernier essai, en resserrant les vêtements contre le corps pour mieux se faufiler et en tenant un morceau de l’extrémité crochue de la branche dans la main.

‘Et c’est parti !’ s’encourage t-il en rampant une troisième fois dans le tunnel gluant, le harpon à bout de bras.
Vous imaginez la scène… un joggeur qui passerait par là, s’enfuirait en hurlant en voyant ce demi-corps d’homme gigoter contre le tronc du chêne, luisant de boue comme un Orque ou un Gollum du Seigneur des Anneaux.

Mais l’idée est bonne, car il s’introduit plus facilement dans le goulot, réussit même à y pénétrer jusqu’aux hanches et sent enfin au bout de sa tige de bois la paire de lunettes qu’il arrive à crocheter et ramener centimètre par centimètre dans la paume de sa main. Enfin !

Victoire. Il pousse un long soupir de soulagement , pour autant qu’on puisse encore faire fonctionner ses poumons dans un endroit pareil et s’abandonne une seconde, tout à la joie d’avoir réussi !

'Bon sang de merde… ça n’a l’air de rien, comme ça… plonger dans un trou pour y récupérer quelque chose… mais il n’a plus vingt ans et surtout, plus la taille d’un jeune homme. Faudra quand même songer très sérieusement à maigrir.’

Et le voilà reparti en marche arrière ou plus exactement, en ramping arrière ( reptation pour celles et ceux que le franglais énerve ), en se contorsionnant des fesses et des épaules. Puisqu’il a ( rappelons-le ) un bras tendu devant lui comme la statue de la Liberté et un autre collé contre la cuisse, comme une sentinelle de Buckingham Palace.

Millimètre par millimètre, il faut un peu de patience dans de telles circonstances. Jusqu’au moment ou quelque chose l’agrippe à la taille. Une racine ou un bout de roche qui s’est inséré sous l’élastique de son jogging.

‘Crénom di d’ju !’ jure t-il en interrompant son mouvement. Va falloir ré-avancer de quelques centimètres vers le fond du tunnel pour détacher l’intrus puis revenir en arrière en se tournant légèrement pour ne plus l’agripper au passage.

Dix minutes. Vous vous rendez-compte ! Dix minutes qu’il fait le gugusse dans ce trou à rat, alors qu’ avec un peu de bon sens, il aurait pu s’épargner : et un jogging merdique dans un bois désert, et un exercice de para-commando dans une boue glaciale.

Et on ne vous parle pas ce qu’il a raté… une grasse matinée bien douillette sous un édredon chaud à point, un déjeuner relax avec un café fumant, deux croissants au beurre et le journal du matin.

‘Mais quel con, tu fais !’ s’invective t-il en reprenant son souffle. Car dans ce sous-terrain pour ver de terre aveugle, on ne peut pas dire qu’il y ait beaucoup d’air. ‘Toujours vouloir briller, jouer au grand sportif et nanani et nanana. Tu as cinquante deux ans. Point. Arrête ton cinéma et accepte-toi comme tu es, espèce de connard !’

‘Bon, c’est pas tout ça... on y va !’. Il se pousse de quelques centimètres vers l’avant puis revient comme prévu en ondulant du popotin… pour se retrouver devant le même problème. Il est coincé.

En fait, la racine a suivi son mouvement et reste solidement accrochée à son survêtement. Elle se trouve également du mauvais côté… c'est-à-dire, celui où son bras ne se trouve pas.

Il essaie de forcer. Pas moyen. Il recommence son mouvement de reptation, en avant, en arrière, en avant, en arrière… la tige le suit docilement, s’entortille dans le tissu et s’accroche de mieux en mieux…

Maintenant, il rugit de rage, s’arrache, se contracte, se secoue tant et peut, glisse dans la glaise, s’arrête une seconde le cœur battant comme une locomotive, puis repart de plus belle. Il transpire comme un lutteur de foire, il crache la terre qui s’infiltre dans sa bouche et même dans ses yeux, il tousse, suffoque, s’interrompt la panique vissée au ventre, recommence plus faiblement, moins longtemps…

***

Et arriva ce qui devait arriver

***

L’écureuil roux descend prudemment de son arbre et avance par petits bonds vers le gros derrière qui a cessé de s’agiter au pied du chêne. Pour lui le temps ne compte pas, mais il a quand même attendu trois heures agrippé à sa branche avant d’oser approcher de cet étrange animal qui semble s’être trompé de terrier.

Il grimpe le long d’une jambe tendue mollement à l’horizontale et s’en va renifler les fesses encore chaudes. Puis, l’ inspection terminée, file aussi vite que l’éclair vers de nouvelles aventures.

Le hasard ne fait pas toujours bien les choses. Enterrer un homme à moitié ! On vous demande un peu… est-ce bien sérieux ?


FIN

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Posté le 11/04/2008 00:22:16
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ici, rien de sérieux alors ça nous va parfaitement! merci Bob.

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la vie est un roman dont je n'ai pas envie d'effleurer la dernière page
cici
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Posté le 29/06/2008 16:01:44 88.122.154.82 - Modération
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:lol momo

bravo bob

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